Théo ou l'amour du bronze

Gérard Jarry est un artiste du pays. Né à Feings, il a vécu et travaillé dans le Perche avant de se retirer à Beaufai. Sculpteur sur bronze, il a exposé à de nombreuses reprises. Du 9 au 16 novembre, le village qui l'a vu naître va accueillir une vingtaine de ses œuvres.

    Feings honore un de ses enfants et cet enfant le lui rend bien. On ne peut pas être plus attaché à son Perche natal que Gérard Jarry, né à la Souricière, fils d'ouvrier agricole, qui lisait chaque semaine à ses enfants la rubrique du journal Le Perche "Le Père la Bricole", écrite en patois percheron.
Gérard Jarry a pris Théo pour nom d'artiste, en souvenir de son grand-père, Théophile, fermier à Courgeoust. Quand Théo parle de lui, il évoque une foule de personnes auxquelles l'attachent des liens d'amitié, de reconnaissance, de filiation spirituelle : son instituteur de Feings, Léon Robert, son maître et ami Serge Santucci, graveur à la Monnaie de Paris qui vit à Planches, Raymond Gosselin, de Rouen, le premier qui l'a initié au monde de la sculpture et de la peinture, et bien d'autres.
Gérard Jarry, on le sent très vite, est un homme heureux. Pas béatement heureux parce qu'il vivrait dans la bulle de son art, coupé du monde. Non, Gérard Jarry a eu sa part d'inquiétudes. Ce bonheur, qui émane de lui, vient de ce qu'il fait ce qu'il a toujours voulu faire : travailler la matière pour en tirer de la beauté.

Une vie professionnelle, un apprentissage de l'art

    S'il ne pratique la sculpture que depuis l'âge de 54 ans, âge auquel un accident de santé l'a contraint à prendre sa retraite, sa carrière tout entière peut être considérée comme un apprentissage de son métier d'artiste, de sculpteur sur bronze.
Elève, à Rouen, dans une école où l'on apprenait la serrurerie, la mécanique, le fer forgé, Gérard Jarry a travaillé de longues années à la fonderie de Randonnai, où il a gravi, les échelons qui l'ont mené de la position de tourneur à celle de contremaître et au service méthode.
Années fécondes, dont il garde un excellent souvenir, malgré le caractère pénible du travail : « Quand le travail est dur, épuisant et même dangereux, explique-t-il, il naît entre les ouvriers une camaraderie, une solidarité qu'on ne trouve pas ailleurs. »
Par la suite, Gérard Jarry a travaillé dans diverses entreprises, toujours au service méthode. Il a fini sa carrière comme directeur d'une usine de moteurs électriques.

La sculpture, de A à Z

    Le rapport avec le sculpture ? C'est qu'aujourd'hui, Théo sait tout faire. Il peut mener sa pièce de la conception, de l'idée, à l'œuvre aboutie, en passant par le modelage en cire, en terre ou en plâtre, puis par la confection du moule en élastomère recevant la cire de moulage. Le moule, placé dans une potée de plâtre réfractaire, est porté à très haute température.
Théo, une fois la pièce démoulée, s'occupe de la ciselure — travail de longue haleine où l'on sent la "patte" de l'artiste — et enfin de la patine. Mais, là, motus. Chaque patineur a ses secrets, ses produits, sa méthode.
Quand il commente une de ses œuvres, Théo montre comment l'idée première de l'oeuvre s'est incarnée dans la forme, la ligne.
Il a déjà beaucoup exposé, à Paris, Avignon, Caen, Saint-Lô, L'Aigle. Il a obtenu, en juin 2003, le cadre d'or régional de Normandie, décerné au château de Beaumesnil.
L‘exposition de Feings présentera environ vingt-cinq œuvres de l'artiste Théo : mais ce sera aussi l'occasion de rencontrer l'homme Gérard Jarry. Elle sera visible du 9 au 16 novembre de 16 h à 18 h.

Le Perche, 5 novembre 2003